[00:00.000] 作曲 : Clément Libes [00:00.17]Ça y est, ils ont fait sauter la tour Eiffel [00:02.52] [00:21.32]Ça y est, ils ont fait sauter la tour Eiffel [00:24.78]On pensait pas qu'ils oseraient mais le mal est fait [00:27.58]Comment on a pu en arriver là ? Difficile à croire [00:30.18]La nuit a été calme, ils ont bombardé que trois fois [00:32.77]Je suis monté à Paris retrouver ma copine [00:35.33]La guerre nous a pris par le col, nous a sortis de la routine [00:37.96]Remplacé les fleurs par les pleurs, les murmures par les cris [00:40.53]Son immeuble a été touché, j'l'ai pas trouvé sous les débris [00:43.26]Je vais rentrer bredouille, rejoindre ma famille dans le premier train [00:46.38]Le départ est prévu pour demain matin [00:48.54]Les hommes sont capables de merveilles et des pires folies [00:51.19]Ça fait 4 jours que j'ai pas d'nouvelles d'Oli [00:53.81] [00:54.35]Putain c'est la guerre ! [00:55.09]On a cassé nos tours d'ivoire [00:56.56]Moi qui l'ait connu qu'au travers des livres d'histoires [00:59.69]J'veille sur la famille, c'est vrai, nos parents s'font vieux [01:02.07]On entasse des bus, on bloque les routes, [01:03.69]On s'protège comme on peut [01:04.73]Et la foule suit ces fous sans camisole [01:06.64]Paraît qu'ils exécutent des gens place du Capitole [01:09.67]Quatre billets pour un ferry [01:11.00]Une chance de s'évader [01:12.23]Une nouvelle vie de l'autre côté de la Méditerranée [01:14.97]Les balles nous narguent, on a peur d'être au mauvais endroit [01:17.62]Mon frère m'a dit "Si j'reviens pas, partez sans moi" [01:20.09]Difficile d'être au courant, ils ont coupé le réseau [01:22.74]Ça fait bientôt quatre jours que j'ai pas d'nouvelles de Flo [01:25.62] [01:54.30]Bien sûr les bruits des wagons bondés me rendent insomniaques [01:59.09]Certains ont mis toute leur maison au fond d'un petit sac [02:01.46]Le train s'arrête et redémarre, me donne des haut-le-cœur [02:04.12]On a fait en deux jours ce qu'on faisait en six heures [02:06.77]J'dois rejoindre la famille au port de Marseille [02:09.02]Mais j'ai pris du retard, j'crois bien qu'ils vont partir sans moi [02:11.86]Quel cauchemar ! [02:12.93]Pas grave, j'les rejoindrai en barque [02:14.54]Pas de réseau, impossible de choper une barre [02:17.14]J'vois une enfant au sol, lui demande si elle est seule [02:19.71]Elle dit qu'elle a vu ses parents couchés sous des linceuls [02:22.38]Les hommes sont capables de merveilles et des pires folies [02:24.99]Ça fait bientôt six jours que j'ai pas d'nouvelles d'Oli [02:27.66] [02:28.06]Direction Marseille ! Un tas d'doutes dans la soute [02:30.25]On fait semblant d'pas voir tous les corps qui longent la route [02:32.75]Les villes ont changé, la vie et l'horreur aussitôt [02:35.84]Les métros sont des dortoirs, les cinémas des hôpitaux [02:38.69]Sous le port, on s'bouscule, on s'entasse devant [02:41.07]D'un coup le ferry apparaît, [02:42.47]Certains tueraient pour une place dedans [02:44.41]À bord, je pleure l'état de ce monde [02:46.25]On a attendu mon frère jusqu'à la dernière seconde [02:49.17]On veut pas être là-bas, on veut juste être autre part [02:51.66]Enfin respirer comme le lendemain d'un cauchemar [02:54.25]Le bateau démarre, je fixe son sillage sur l'eau [02:56.87]Ça fait bientôt sept jours que j'ai pas d'nouvelles de Flo [02:59.70] [03:29.72]Arrivé sur le port de Marseille avec la petite fille dans mes bras [03:32.82]Presque un jour de retard, ils sont tous partis sans moi [03:35.32]Mais j'ai les contacts d'un passeur, une plage et une heure [03:38.03]Plus de trente, entassés, bien sûr, on ne voyage pas seul [03:40.64]Il me dit : "Choisis la fille ou ton sac pour jeter du lest" [03:43.17]Puis je vide mes poches et lui donne tout ce qu'il me reste [03:45.95]Et me voilà parti, acteur d'une drôle de fable [03:48.52]À la conquête du paradis sur mon bateau gonflable [03:51.22]On navigue loin d'ici [03:52.40]Et plus les vagues s'agrandissent, plus notre espoir rétrécit [03:56.35]Et ça tangue, et ça tangue [03:57.66]Certains tombent dans le ventre de la bête [03:59.64]Nous voilà en pleine tempête [04:01.47]En une seconde, la fille m'échappe et plonge [04:04.17]J'entends ses cris emportés par la mer qui gronde [04:06.68]La pluie, le sel et les larmes se mélangent [04:09.30]Une femme s'agrippe à mes hanches et m'entraîne dans la danse [04:11.98]Le bateau se retourne, on se colle et on coule [04:14.38]Nos appels à l'aide sont perdus dans la houle [04:17.24]Dire qu'il n'y a pas longtemps j'étais avec mes amis [04:19.71]On allait de bar en bar pendant toute la nuit [04:22.24]Mes poumons se remplissent d'eau et mes yeux se ferment [04:24.94]Mon âme éteint sa lanterne [04:27.61]Les hommes sont capables de merveilles et des pires folies [04:30.23]Je n'aurai plus jamais de nouvelles d'Oli [04:32.95] [04:40.43]Le bateau accoste [04:44.50]Première vision, des barbelés [04:46.07]Ça, mon frère ne m'en avait pas parlé [04:48.92]Encore des armes et des pare-balles [04:51.28]On nous fait signer des papiers dans une langue qu'on ne parle pas [04:54.06]On nous fouille, nous désinfecte comme des animaux [04:56.99]On nous sépare de mon père, [04:58.25]Pas le temps de lui dire un dernier mot [04:59.56]Dans des camps provisoires, des couvertures, un matelas [05:01.91]Un Niçois me raconte qu'il est là depuis des mois [05:04.60]Toulouse me manque déjà [05:05.89]Ma mère s'endort dans mes bras [05:07.31]Elle me répète tout bas que Flo nous rejoindra [05:10.01]La chaleur étouffe, on a vidé toutes les bouteilles [05:12.25]Dans un journal, j'apprends qu'ils ont fait sauter la Tour Eiffel [05:15.19]Le lendemain on nous entasse dans des bus [05:17.25]Les autres sur les uns, qui peut le moins peut le plus [05:19.78]Des centaines de fous accompagnent notre départ [05:22.29]Des poings brandis en l'air, des cris, des sales regards [05:25.01]Je croise celui d'un type qui scande avec ferveur [05:27.45]C'est la première fois du périple que j'ai vraiment peur [05:30.28]Je ne vois que lui au milieu de la foule [05:32.77]Sur sa pancarte, il est écrit "Rentrez chez vous !" [05:35.71] [05:56.59]- Mais je suis désolé, on ne peut pas accueillir tous les Français. [05:59.88]On ne peut pas accueillir tous les Français. Ils arrivent par milliers [06:02.94]- Si ils avaient un minimum d'honneur, [06:04.95]ils retourneraient dans leur pays et combattraient pour la France. [06:08.38]Ils combattraient pour défendre leur famille et leur honneur. [06:10.82]C'est comme ça, je suis désolé [06:12.32]- On vient de Nantes. Ils ont tout détruit, tout détruit à Nantes. [06:17.05]Il ne reste plus rien, on avait tout là-bas, [06:19.15]on vient de perdre tout ce qu'on avait. [06:20.36]Euh... Je sais pas quoi faire, je ne sais pas où aller. [06:22.18]J'ai perdu des gens de ma famille... [06:23.55]- Aujourd'hui la plupart des problèmes de notre pays qu'on est, [06:26.58]c'est d'la faute des Français. Je suis désolé. [06:28.60]Avant qu'ils arrivent chez nous, tout allait bien. [06:30.64]Donc on ne peut pas non plus accueillir des gens [06:33.26]qui viennent chez nous pour foutre le bordel !